L’ÂGE DU REGRET : LA SOCIÉTÉ APRÈS LA MODERNITÉ LIQUIDE.

…le phénomène de la dette s’empare du mode de vie dans l’âge de la régression. Comme nous l’avons appris lors des études de la Pensée politique contemporaine, à l’heure actuelle, nous devons penser le phénomène de la dette comme étant au fondement…

 

«A free man thinks of nothing less than death, and his wisdom is a meditation not of death, but of life».
Baruch Spinoza

 

Table de matières

  1. Introduction.
  2. La fragmentation des liens sociaux. 
  3. L’évolution de la scène des communications.
  4. Les médias dans l’âge du regret.
  5. Les laboratoires d’idées et sa convenance aux politiques conservatrices.
  6. L’individu contemporain.
  7. La financiarisation et le phénomène de la dette.
  8. Conclusion.
  9. Références bibliographiques.

 

Introduction

Quel est le réflexe des vieilles formules de façonnement de l’inconscient collectif dans un monde «hyperconnecté» comme nous le connaissons à l’heure actuelle? Notre intérêt à répondre à cette question est lié à l’intérêt de comprendre la route prise par la société contemporaine qui l’aurait amené à l’actuelle conjoncture. Basés sur les faits de l’actualité, nous témoignons d’une montée des discours autoritaires « garnis » des formules populistes existantes depuis plus d’un siècle. Une polarisation dans le champ des idées renforce le discours de l’industrie culturelle qui hausse le ton contre toute force contraire aux intérêts du marché.
Il est approprié de faire valoir dès ces premières lignes que ce travail n’est que le début d’une recherche en quête de comprendre l’humanité à partir d’une réflexion critique du comportement de l’homme contemporain. Nous jugeons le sujet prétentieux, cependant nous voulons prendre le temps nécessaire de bien le décortiquer pour mieux le comprendre. Pour ce faire, nous devons d’abord pouvoir passer par cinq sujets incontournables qui vont nous aider à comprendre l’actuelle «hypernormalisation de la haine» dans l’ensemble des sociétés occidentales.
Notre abordage voit la communication de masse après la convergence des technologies de la communication – TIC. Cela nous a permis d’expliquer comment l’hyperconnectivité a changé la vitesse dans laquelle les changements de paradigmes se sont imposés. Nous voulons cadrer l’homme dans la société laquelle il est inséré et démontrer ses différentes caractéristiques, confrontées aux importants changements dans la conception des biens et des habitudes de consommation. Le renouvellement technologique ajouté aux échelles de la globalisation économique a ramené d’anciens concepts de la vie en société. Il a donné à l’« esprit de foule » de l’homme post-moderne la « souplesse » nécessaire à l’établissement d’un nouvel ordre économique. L’avancement des politiques néolibérales dans une société chaque fois plus penchée sur la consommation des biens, des services et des images, signes de réussite dans un monde post-moderne, «liquide», a permis un essor de l’individualité, responsable pour l’affaiblissement progressif des liens sociaux dans l’âge contemporain.
Cette étude vise à interpréter les sociétés occidentales post-modernes à partir de la fragmentation des liens sociaux. L’état « liquide » de l’âge post-moderne, proposé par Zigmunt Bauman aurait évolué à un âge de la régression, expliqué par Arjun Appadurai comme une fatigue démocratique1. C’est le retour des politiques populistes basées sur des politiques néolibérales prédatrices qui s’appuient sur un média détaché de toute valeur morale.

 

La fragmentation des liens sociaux.
«  Contrairement à la «  communauté » (totalité baptisée ainsi rétrospectivement alors même qu’un nouveau cadre, baptisé « société », s’efforçait de remplir le vide normatif laissé par son retrait), les nouvelles puissances normatives (« sociétales » et non «  communautaires  ») se bornèrent globalement à commander l’espace social que l’on pouvait embrasser avec la seule aide de l’imagination. Elles ne désoccupèrent pas du domaine des relations interpersonnelles, du micro espace de la proximité et du face-à-face. Au sein de ce micro-espace, les outils utilisables et efficaces dans l’interaction personnelle pouvaient désormais être utilisés librement pour la « socialisation – c’est-à-dire les interactions humaines quotidiennes, l’établissement et la révocation des engagements entre personnes, dans la création et la destruction de liens entre les hommes, ainsi que dans le choix d’une stratégie à suivre pour accomplir toutes ces tâches2».

Un quatrième cycle d’évolution sociale aurait vu le jour, notamment grâce à l’évolution technique comme expliquée par Muller3. La technique qui permet de «  projeter une totalité historique4 » est placée au centre du discours contemporain. Cette époque post convergence médiatique5 a permis l’évolution du processus communicationnel. Dans ce contexte, nous pouvons croire que toute idéologie placée au centre des deux champs idéologiques (gauche vs droite) finit par imposer un défi par rapport aux marqueurs culturels de chacun de ces deux moments. Au-delà de l’idée d’une « post-technique » qui mènerait l’individu à une « post-individualité » en accord avec le champ idéologique, l’individu s’attache à une identité collective individualiste, qui serait la voie qui mène la société occidentale à un nouvel âge, l’« âge de la régression ». Bienvenus au monde contemporain.

—————————–

1. Arjun Appadurai, «Une fatigue démocratique», chap. in, L’âge de la régression, Premier Parallèle, Belin, 2017, p. 19.

2. Zigmunt Bauman, « La vie liquide », Pluriel, Paris, 2013, p. 38.

3. Pierre Muller, «La société de l’efficacité globale», Presse universitaire de France, Paris, 2015, p. 166.

4. Hebert Marcuse, « L’homme unidimensionnel », Les éditions de minuit, Paris, 1968, p. 178.

5. Éric George, « De la convergence à la divergence : enseignements issus des stratégies des entreprises médiatiques canadiennes », Actes du colloque de l’Association canadienne de communication (ACC) dans le cadre du Congrès de la Fédération canadienne des sciences humaines (FCSH), Montréal, en ligne <http://cca.kingsjournalism.com/?p=4&gt;, consulté le 1er novembre 2017.

L’évolution de la scène des communications.
«Moulin à bras vous donnera la société avec le suzerain; le moulin à vapeur vous donnera la société avec le capitalisme industriel6». Cette phrase a été avancée par Hebert Marcuse quant à la modernité et nous en ajoutons : le moulin faisant affaire sur les bourses (stock market) et vendant ses produits sur un magasin virtuel du web 2.0 vous donnera le capitalisme néolibéral, des marchés financiers tels que nous le connaissons dans l’époque actuelle.

Selon Michel Guénaire, « ce qui unifie la pensée libérale de son origine seau idéologique est un équilibre entre deux libéralismes7». Cependant, à l’heure actuelle la voie économique est devenue la seule prémisse du néolibéralisme des marchés. Un déséquilibre qu’aurait assolé « l’organisation du monde ». Les institutions ne comptèrent pas nécessairement beaucoup, dans cette nouvelle forme de libéralisme. Un devis moral qui s’impose à l’heure actuelle. Comme nous les avons connues jusqu’à l’âge moderne, les deux prémisses sur lesquelles se posait le libéralisme seraient celle du politique (et ses pouvoirs institutionnels) et de l’économie (qui comprend la valorisation du libre-échange et la création de richesses)8. Détaché de la veine politique, le néo-libéralisme a évolué à une sorte de régime d’aberrations où la veine économique s’étend. Elle va suffoquer la veine politique libérale.

L’espace public était intrinsèquement lié à la possibilité de l’individu participer de la vie sociale en toute liberté. L’omniprésence de l’industrie culturelle a suffoqué les projets de société existants et l’idée d’un espace public inclusif et démocratique s’est transformée. L’effort des corporations de médias pour augmenter leur profit a naturellement causé un souci logistique de maximisation des ressources, une production massive de l’information, ainsi qu’une quête pour un meilleur processus de distribution.

—————————–

6. Hebert Marcuse, « L’homme unidimensionnel », Les éditions de minuit, Paris, 1968, p. 177.

7. Michel Guénaire, «Libéralisme et néo-libéralisme : continuité ou rupture?», Le Débat, 2014, p. 53.

8. Ibid., p. 53.

Les médias dans l’âge du regret.
Les médias dans l’âge contemporain nuisent à la liberté lors qu’ils vantent l’idée d’une liberté inatteignable. Ils interfèrent dans l’idéal libertaire des citoyens. La morale du monde a été transformée sous l’influence d’une industrie culturelle. Le phénomène de « fake news » ou « post-vérité » est arrivée en force et puissance à la scène des médias occidentale. On condamne sans preuve dans les téléjournaux à l’heure de pointe partout en Amérique latine. À l’unisson, les médias conservateurs trouvent année après année de nouvelles cibles. Ils projettent leurs méchancetés directement dans les lobes frontaux des citoyens. La vulgarisation du message est à l’ordre du jour.
Un souci plutôt avancé par la théorie de l’économie politique définie par Mosco lors des explications sur la «spatialisation»9. L’unification de pratiques entourant la vulgarisation du message dans l’espace public devient lieu commun dans la société contemporaine. Les acteurs de l’industrie culturelle ont connu, avec l’avènement de l’Internet, un essor qui a transformé par complet les bases limitrophes de l’influence de cette industrie dans la société. Selon Dacheux et Rouquette, « la croissance d’Internet semble renouveler la problématique de l’espace public». Avant confiné à l’intérieur de frontières nationales, le message passe dès lors à connaître une envergure internationale10.
Dans son article La moralisation de l’argent ou limitation de son pouvoir, Bernard Perret suggère que l’éthique serait une façon naturelle d’exorciser les démons d’un système. Ces démons sont présentés dans son livre comme la métaphore qui définit « l’emprise du capitalisme libéral sur la logique du profit ». L’auteur mentionne le rôle de la monétarisation de l’échange social, comme facteur multiplicateur des situations de corruption11.

—————————–

9. Vincent Mosco, «Les nouvelles technologies de communication. Une approche politico-économique», Réseaux, vol. 18, no 101, 2000, p. 102.

10. Eric Dacheux et Sébastien Rouquette. « Quand le débat académique des sic éclaire le débat public ». In Communication et débat public : les réseaux numériques au service de la démocratie?, sous la dir. de Béatrice Vacher, Christian Le Moënne et Alain Kiyindou, Paris : Harmattan, 2013 p. 168.

11. Bernanrd Perret, «Moraliser l’argent ou limiter son pouvoir» In Éthique et capitalisme. Sous la dir. de Denis Dupré, Economica, 2002, p. 61.

Les laboratoires d’idées et sa convenance aux politiques conservatrices.

Les think tanks, souvent liés directement aux intérêts partisans, élaborent des rapports politiques qui changent la donne des politiques publiques. Les néoconservateurs auraient réussi une vraie conquête idéologique sur ce genre d’activité. Les think tanks s’immiscent dans de différentes sphères de pouvoir couvrant avec son influence le processus de communication, l’opinion publique ainsi que la formulation des politiques publiques en ce que concerne aux questions environnementales. Boucher et Royo vont définir ces laboratoires comme un «composant essentiel de la stratégie des états […] qui fait partie de la diplomatie intellectuelle […], qui représente une arme de poids dans la guerre des idées12». Un exemple clair de la capacité de ces organisations est le PNAC – Project for the New American Century. Ce projet a été au début des années 2000 jusqu’à 2006 le principal représentant de l’idéologie néoconservatrice13. Son rapport concernant les armes de destruction de masse irakiennes, aujourd’hui à maintes reprises démenti, était au centre de la guerre controversée en Irak qui a mené à l’assassinat du leader irakien Saddam Hussein.

Les autoroutes de l’information, comme mentionnées par McLuhan, auront aidé à étendre la dimension et l’ampleur dans la diffusion de ses rapports. L’espace public a connu un changement de forme et de sens14 Cela a été dû à l’ampleur prise par l’industrie culturelle au sein de la société contemporaine après la convergence des technologies de l’information et de la communication. Dans ce sens, nous mentionnons Pierre Muller lors de ses considérations concernant les changements globaux relatifs aux pratiques sociétales. Muller va comparer le rôle des universitaires et des think tanks à celui des lobbys. L’auteur explique :

«L’environnement constitue un bon exemple de ‘sectorisation impossible’ pour lequel le rapport de causalité fonctionne pourtant comme la construction autoréflexive d’une relation entre la société et elle-même. L’action publique y semble prise en étau entre l’impossibilité de mettre en secteur un problème qui concerne toutes les sphères de la société et la nécessité de produire une référence sectorielle pour agir15».

Donald E. Abelson corrobore avec l’idée de Muller et il va encore plus loin dans cette affirmation. S’en servant des données statistiques pour expliciter le nombre exact des fois que tous les principaux think tanks auraient été mentionnés par les médias, l’auteur expose comme ces chiffres sont surprenants. Selon Abelson, le Brooking Institution, le think tank le plus cité dans les médias américains entre 1998 et 2008 aurait été mentionné 392 fois à la télévision, 8361 fois dans les journaux, 431 fois dans des magazines. Au total, cet institut tout seul a figuré 9.184 fois dans les médias américains au cours de dix ans16. C’est une moyenne approximative de 2,5 fois par jour durant une décennie. Au Canada, entre 2000 et 2008, seulement le Fraser Institute a été cité 5.547 fois, desquelles 5.454 fois ont été dans les journaux17.

«Although data on each indicator may provide insight into the amount of exposure think tanks and their staff generate, they cannot confirm how much or how little influence they have in shaping public opinion and the preferences and choices of policymakers. For instance, several think tanks tally how often their organizations are referred to in the media and the number of times their staff are called on to testify before legislative committees. 18»

—————————–

12. Stephane Boucher et Martine Royo, op. cit., p. 12

13. François-Bernard Huyghe, «Think tanks : quand les idées changent vraiment le monde – France Culture», Vuibert, Paris, 2013, p. 66.

14. Jan Spurk, « Contre l’industrie culturelle: les enjeux de la libération», Bord de l’eau, Lormon, 2016, p. 61.

15. Pierre Muller, «La société de l’efficacité globale», Presse universitaire de France, Paris, 2015, p. 166.

16. Donald E. Abelson, «Do Think tanks matter: Assessing the impact of public policy institutes», McGill-Queens University Press, 2009, p. 202.

17. Donald E. Abelson, Op. Cit., p. 228.

18. Ibid., p. 170.

 

L’individu contemporain
Le libre-échange est tenu en tant que valeur majeure. Tout pays refusant de donner accès à ses marchés est vu par les États-Unis (rempart du néolibéralisme de marchés) et certains partenaires, adeptes de la paranoïa belliciste américains, comme ennemie et pourtant, attaqué et saboté à l’épuisement. La liberté économique a chevauché la liberté politique. Pankaj Mishra explique qu’il existe actuellement un «ressentiment», fruit de l’inégalité sociale creusée encore plus après la libéralisation globale des marchés. Ce ressentiment est né fruit de l’approfondissement des inégalités qui a eu lieu avec globalisation. Comme avancé par Mishra, cette dérive néolibérale a un impact direct sur le comportement humain et nous voulons l’analyser.
Selon Zygmunt Bauman, un virage consumériste a pris la place à partir de l’essor des technologies de l’information et de la communication (TIC), évidemment supporté sur une approche économique de la production néolibérale. Le rythme de remplacement de produits serait effréné. L’homme post-moderne devient une sorte de frénétique en quête d’un «certificat d’identité». Sa frénésie serait liée à la quantité d’informations et signes auxquels les individus sont exposés et obligés d’en suivre. Cette caractéristique marquante de la postmodernité, serait caractérisée par Bauman le syndrome du consumérisme, qui découle d’un modèle de consommation en tant qu’effet secondaire de la «maketisation» de la vie dans la société post-moderne ainsi que contemporaine. Dans cette perspective, toute la société post-moderne et contemporaine serait misée sur la consommation illimitée et tout acte de consommation aurait pour produit final le déchet19.
Dans le monde contemporain, l’individu exerce une «citoyenneté en réseau20», ce processus aurait été renforcé par une de sectorisation de l’emploi, comme avancé par Pierre Muller. Au-delà de l’individu assiégé, comme Bauman l’avait défini, l’individu dans l’âge de la régression est engagé politiquement par biais des réseaux sociaux. «Cette nouvelle citoyenneté repose sur la diffusion mondiale d’une forme de connaissance partagée21». Dans l’autre face de la monnaie, nous trouvons les individus bien nantis, les détenteurs de capitaux qui déposent ses fortunes dans les paradis fiscaux, laissant la plus mince partie de ces fortunes à contribuer avec les taxes et impôts. C’est la «citoyenneté numérique mondialisée» comme avancée par Muller. Dans un tel décor, assistons-nous à un rejet de la démocratie libérale à l’échelle mondiale?
Selon Arjun Appajurai, le monde aurait glissé vers la droite idéologique. Les leaders politiques et les citoyens entretiennent des relations fondées sur une contradiction entre «les ambitions, visions, et stratégies des uns et les craintes, blessures et colères des autres22». Les leaderships conservateurs, pourtant xénophobes et autoritaires seraient en vogue. Il faut qu’on pose des questions sur les dirigeants qui représentent cette vague réactionnaire et ses relations avec les citoyens.
Ces réalités semblent ne jamais avoir disparu. Elles reviennent donc en force. Le capitalisme néolibéral tel qu’on le connaît actuellement serait bien organisé et bien structuré, contrairement au capitalisme précédent. Les cadres de l’entreprise moderne, multinationale, font partie d’une nouvelle réalité inexistante dans les étapes précédentes du système capitaliste. Une nouvelle structure de classe tripolaire s’est formée, composée par capitalistes, cadres et classes populaires. Une véritable transformation du système capitaliste, une évolution de celui-ci. Ce sont les cadres qui gèrent les compagnies multinationales23. La propriété s’est diversifiée et la gestion de l’économie de l’État-nation n’est plus sous le contrôle de l’État, mais sous le contrôle du grand capital. La souveraineté nationale est en crise24. Nous assistons au retour des structures de base de la lutte de classes. Nous avons maintenant deux classes dominantes, celle des grandes propriétés et celle des cadres, les gestionnaires25.
Dans ce contexte, le populisme fleurit par biais des identités culturelles. La masculinité en Russie, le néo-ottomanisme en Turquie, l’hindutva en Inde, la «blanchitude» glissée aux États-Unis, les «canards de la FIESP» au Brésil, sont tous exemples de populismes de l’âge actuel. Un nouveau symbolisme simpliste s’empare de l’inconscient collectif, planté par les médias de masse avec l’aide des réseaux sociaux. Incapables de contrôler leurs économies nationales, la cure serait cherchée parmi la purification culturelle nationale26. Malgré le fait qu’il y a une grande transformation du capitalisme, il semble avoir une permanence des institutions étatiques qui témoignait du processus irréversible de l’État social. Dans cette conjoncture, les luttes de classes rencontrent une limitation.

—————————–

19. Ibid., p. 117.

20. Pierre Muller, op.cit., p. 108.

21. Ibid., p. 108.

22. Arjun Appadurai, op. cit., p. 18

23. Jean-François Lessard, «Notes de cours», Montréal, automne 2018.

24. Arjun Appadurai, op. cit., p. 19

25. Jean-François Lessard, «Notes de cours», Montréal, automne 2018.

26. Arjun Appadurai, op. cit., p. 23.

 

La financiarisation et le phénomène de la dette.
Muller, qui conceptualise les changements sociaux par le biais de cycles, va définir l’âge actuel comme «le cycle de la gouvernance durable27». Selon lui, la crise de 2008 aurait ouvert la porte à l’«accélération de la financiarisation de l’économie liée au développement d’instruments monétaires de plus en plus automatisés28». L’auteur explique qu’il serait perceptible le caractère partiel de l’adoption de certaines politiques publiques, en fonction du secteur impliqué dans ces politiques, à l’âge actuel. Le système fonctionnerait, selon Muller, d’une forme de rapport global sectoriel comme opérateur de causalité pour expliquer le changement29.
Dans ce «décor», le phénomène de la dette s’empare du mode de vie dans l’âge de la régression. Comme nous l’avons appris lors des études de la Pensée politique contemporaine, à l’heure actuelle, nous devons penser le phénomène de la dette comme étant au fondement de l’organisation sociale. L’homme endetté représenterait dans ce contexte le citoyen modèle, consommateur dans une société néolibérale. La vie sociale dans ce néolibéralisme des marchés financiers est un acte constant de convoiter les mécanismes d’exploitation, mais également les mécanismes de domination comme outils de la vie contemporaine. Le phénomène de la dette ne distingue pas les différents individus, travailleurs, retraités, etc. Il s’applique au-delà de ces distinctions sociales. Cette «pratique sociale» vient accompagnée d’une culpabilité de l’individu. Dans cette nouvelle dynamique, les détails divergent d’un individu à l’autre, mais la dynamique est maintenue. La société contemporaine connaît une dépossession collective qui s’exprime de trois façons : la dépossession du pouvoir politique qui est concédé à la démocratie, la dépossession d’une partie grandissante de la richesse à cause des baisses d’impôt successives et la dépossession face à l’avenir30.

—————————–

27. Pierre Muller, op.cit., p. 100.

28. Ibid., p. 100.

29. Ibid., p. 166.

30. Jean-François Lessard, «Notes de cours», Montréal, automne 2018.

 

Conclusion.
En guise de conclusion, l’idéal capitaliste vendu par l’industrie culturelle a été intensifié par la «convergence» des technologies de l’information et de la communication (TIC). La liberté va être «vendue» par cette industrie comme atteignable seulement par des moyennes libérales. Ces derniers sont notamment publicisés par l’idéal d’acquisition marchande des biens de consommation. C’est le discours dominant dans l’espace public. La vulgarisation du message est devenue le standard du marché des télécommunications, soucis d’une économie politique qui donne encore plus de pouvoir au divertissement. Soudainement, tout le système politique se voit un otage d’une vulgarisation dans les médias, ainsi que d’une polarisation idéologique du champ social, supporté par la force des algorithmes qui agglutinent de milliards de personnes aujourd’hui autour des réseaux et médias sociaux, véritables boules idéologiques.
Le phénomène de la dette a pris d’assaut la société moderne. L’homme est de nouveau un esclave d’un système d’exploitation où la viande la moins chère est la chère pauvre des minorités. Les populismes ont pris la place dans l’espace public et une vraie distorsion des valeurs est revenue à vogue. La morale est morte. De persécuter et juger des minorités est le sujet à entretenir les citoyens dans les médias occidentaux. Une «hyper normalisation» de la haine prend ampleur et la peur courante est celle du retour aux régimes totalitaires.
La géopolitique internationale est prise d’otage dans les mains du grand capital financier. Les tensions augmentent cas la population n’arrive pas à comprendre l’(in)action de leur gouvernement face à l’escalade de coupures de droits et l’effacement des conquêtes provenant de la lutte de classes, tout au long du XXe siècle. L’évolution du libéralisme à un néolibéralisme des marchés a enlevé le pouvoir de l’État nation et supprimé les désirs de l’État-providence. Nous témoignons un recul sans précèdent dans les droits et libertés individuelles à partir de l’essor des réseaux et médias sociaux.
La post-vérité s’exprime par le biais de fake news très bien soutenues par les centres de recherche néoconservateurs. L’homme contemporain est rempli de convictions qui sont basées sur des mensonges véhiculés sur les médias et amplifiés sur réseaux sociaux. Le cadre est chaotique. L’heure actuelle est définie par plusieurs auteurs comme l’âge de la régression, mais elle pourrait bien être comprise comme l’âge du regret. La tension est telle qu’il nous semble qu’un moment donné les ogives nucléaires vont commencer à pleuvoir autour du monde. Finalement, l’humanité parait être rentrée en «mode restart».

 

Références bibliographiques
Abelson, Donald E., «Do Think tanks matter: Assessing the impact of public policy institutes», McGill-Queens University Press, 2009.

Appadurai, Arjun, «Une fatigue démocratique», chap. in, L’âge de la regresison, Premier Parallèle,Belin, 2017.

Bauman, Zigmunt, « Parvenu and Pariah : the Heroies and Victims of Mordernity », Chap. In, Post modernity and its dicontents, New York University Press, 1997.

Bauman, Zigmunt, «La vie liquide», Pluriel, Paris, 2006.

Dacheux, Eric et Sébastien Rouquette. « Quand le débat académique des sic éclaire le débat public ». In Communication et débat public : les réseaux numériques au service de la démocratie?, sous la dir. de Béatrice Vacher, Christian Le Moënne et Alain Kiyindou, Paris, Harmattan, 2013.

George, Éric, « De la convergence à la divergence : enseignements issus des stratégies des entreprises médiatiques canadiennes », Actes du colloque de l’Association canadienne de communication (ACC) dans le cadre du Congrès de la Fédération canadienne des sciences humaines (FCSH), Montréal, en ligne <http://cca.kingsjournalism.com/?p=4&gt;, consulté le 1er novembre 2017.

Guénaire, Michel, «Libéralisme et néo-libéralisme : continuité ou rupture?», Le débat, 2014.

Huyghe, François-Bernard, «Think tanks : quand les idées changent vraiment le monde –

France Culture», Vuibert, Paris, 2013.

Lessard, Jean-François, «Notes de cours», Montréal, automne 2018.

Marcuse, Hebert, « L’homme unidimensionnel », Les éditions de minuit, Paris, 1968, p. 177.

Mosco, Vincent, «Les nouvelles technologies de communication. Une approche politico-économique», Réseaux, vol. 18, no 101, 2000.

Muller, Pierre, «La société de l’efficacité globale», Presse universitaire de France, Paris, 2015.

Perret, Bernanrd, «Moraliser l’argent ou limiter son pouvoir» In Éthique et capitalisme.

Sous la dir. de Denis Dupré, Economica, 2002.

Piketty, Thomas, « Le capital au XXIe siècle », Édition du seuil, Paris, 2013.

Spurk, Jan, « Contre l’industrie culturelle: les enjeux de la libération», Bord de l’eau, Lormon, 2016.

Autor: Novo Jornal Nacional

"Nao sei, leia na minha camisa".

Deixe um comentário

Este site utiliza o Akismet para reduzir spam. Saiba como seus dados em comentários são processados.